
D’après un article de Jean-François Rauger
Edition Journal "Le Monde"
Le nom de Glenn Ford est attaché à un cinéma hollywoodien qui, après la guerre, commence à exprimer toute une série d'inquiétudes. L'optimisme et le sens de l'épopée, qui s'exprimaient durant l'âge d'or des années 1930 sont révolus lorsque le film noir s'impose et que le western s'interroge sur ses origines et soumet ses héros au doute. Glenn Ford, avec plus de cent films à son actif, aura représenté un type de héros, plus réaliste, en phase avec ce basculement du cinéma américain.
Gwyllin Samuel Newton Ford est né le 1er mai 1916 à Sainte Christine, au Canada, dans la province du Québec. Sa famille émigre en Californie, à Santa Monica, en 1924. Après quelques années de théâtre sur
C'est donc après-guerre qu'il parvient au vedettariat. D'abord un film avec Bette Davis (A stolen Life de Curtis Bernhardt en 1946) et puis, surtout, Gilda avec Rita Hayworth réalisé la même année par Charles Vidor. Le film deviendra mythique pour une célèbre séquence où Rita Hayworth retire lascivement son gant pour devenir un emblème de l'érotisme hollywoodien et la marque d'un relatif amoralisme sceptique face au monde corrompu et désenchanté qui sera celui du film noir.
Glenn Ford y incarne un joueur professionnel qui retrouve et séduit à nouveau une femme qu'il a aimée et qui est mariée au cynique propriétaire d'une maison de jeu. Gilda contribuera beaucoup à la fascination de la cinéphilie d'après-guerre, notamment en France, pour le cinéma américain.
Réalisme Psychologique
Glenn Ford tiendra le rôle principal dans plusieurs westerns dont certains comptent parmi les plus réussis de cette période : L'Homme de nulle part (Jubal, 1956), Trois heures dix pour Yuma (3:10 to Yuma, 1957) et CowBoy (1958), signés Delmer Daves. Une volonté de réalisme psychologique s'incarne parfaitement dans des personnages à l'humanité affirmée. La première balle tue (The Fastest Gun Alive, 1956) de Russel Rouse sera une autre réussite du western.
De nombreux critiques de cinéma le jugeaient sous-évalué et l'un d'eux, David Shipman, a écrit qu'il était "un bon exemple, si ce n'est le meilleur, de l'acteur fiable et efficace" (l'acteur avec Shirley MacLaine en 1958 sur le tournage du film
Il sera, en 1961, la vedette du film de Frank Capra, Milliardaire d'un jour (Pocketful of Miracle), dont il est aussi producteur-associé.
Mais avec les années 1960, c'est toute une période qui prend fin à Hollywood pour laisser place à l'incertitude, à la parodie, à la perte de confiance.
Glenn Ford devient alors, comme de nombreux acteurs de sa génération, une vedette de la télévision. Il incarne le shériff Sam Cade dans la série du même nom à partir du début des années 1970 et tient un des rôles principaux du feuilleton The Family Holvak à partir de 1975. Désormais, il apparaît dans un film un peu comme une vieille gloire hollywoodienne invitée (Superman, de Richard Donner en 1978 où il est le père adoptif du super-héros). Celui qui déclarait n'avoir finalement incarné que lui-même à l'écran ne tournera plus après 1991.