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Alphaville | Jean-Luc Godard | 1965

Titre : Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution

Réalisation : Jean-Luc Godard

Acteurs principaux : Eddie Constantine, Anna Karina, Akim Tamiroff

Scénario : Jean-Luc Godard

Photographie : Raoul Coutard

Montage : Agnès Guillemot

Musique : Paul Misraki

Production : André Michelin

Société(s) de production : Athos Films

Pays d’origine : France, Italie

Langue(s) originale(s) : (fr)

Genre : Policier, Science-fiction, Dystopie

Durée : 99 min

Sortie : 5 mai 1965

Principale(s) récompense(s) : Ours d'or au Festival de Berlin en 1965






Traité de Bave et d'Eternité | Venom and Eternity | Isidore Isou | 1951

Traité de bave et d’éternité | Venom and Eternity.

Réalisation : Isidore Isou

Film ciselant en n. et b. 35m/m, sonore.120’.

Avec : Marcel Achard, Jean-Louis Barrault, Blaise Cendrars, Jean Cocteau, Danièle Delorme, Daniel Gélin...

Production Marc Gilbert Guillaumin. Présenté le 5 juin 1951 au cinéma Alexandra.




Le Manifeste Du Cinéma Lettriste

"Traité de bave et d'éternité", d'Isidore Isou, prix de l'avant-garde à Cannes en 1951

Isidore Isou est un Roumain débarqué à Paris en 1946. Il a lancé alors un nouveau mouvement appelé le Lettrisme, manifeste pour une poésie phonétique. Cheveux coiffés très rock, au gel, ce jeune conquérant s'en prend aux gardiens du temple littéraire (Gide, Paulhan, Breton), et jette les bases d'une révolte de la jeunesse qui préfigure le situationnisme.

En 1951, résolu à révolutionner l'expression artistique, il lance un Manifeste du cinéma discrépant dans lequel il prône la disjonction entre son et image, et réalise ce film légendaire [...]. Ce "traité" esthétique fut projeté au Festival de Cannes où un jury improvisé, composé de Jean Cocteau, Raf Vallone et Curzio Malaparte, lui décerna le Prix de l'avant-garde créé pour l'occasion. Il décrocha une critique dans les Cahiers du cinéma, signée Maurice Schérer (alias Eric Rohmer), qui vantait en particulier sa manière de filmer le quartier de Saint-Germain-des-Prés.




Des images nouvelle vague

Annonçant le cinéma de Guy Debord et celui de Jean-Luc Godard, ce film manifeste dans lequel des images très Nouvelle Vague sont accompagnées d'un texte très littéraire (logorrhée verbale sur l'amour et la révolte) est, on le redécouvre, beaucoup moins provocateur qu'on l'a dit, en dépit des plans montés tête en bas et des graphismes ciselés à même la pellicule. Agressif ("Je voudrais vous donner des névralgies"), disciple de Lautréamont, ce montage de documents hétéroclites où l'on reconnaît les "têtes pensantes" de l'époque (Marcel Achard, Jean-Louis Barrault, Armand Salacrou, Blaise Cendrars...) est plus que visible : c'est un vrai film d'auteur, poétique, fulgurant.

Article - Jean-Luc Douin - Le Monde







Extrait : Traité de Bave et d'Eternité | Venom and Eternity (1951) Isidore Isou


Patrick Dewaere | Interview | 1982


Dernière interview (En 3 parties) que Patrick Dewaere donna le 13 juillet 1982, chez lui, Impasse du Moulin Vert, à Paris, au journaliste Canadien Michel Jasmin.


















Interview de Patrick DEWAERE 1ere Partie (Durée : 7m 34s)





Interview de Patrick DEWAERE 2eme Partie (Durée : 7m 13s)





Interview de Patrick DEWAERE 3eme Partie (Durée : 4m 04s)




Le journaliste Michel Pascal interview le réalisateur Alain Corneau | Hommage à Patrick Dewaere.


Patrick Dewaere | Interview Alain Corneau | Hommage (Durée : 3m 47s)


Ladri di Biciclette | Le Voleur de bicyclette | Vittorio de Sica | 1948

Vittorio De Sica : Un artiste sensible et lucide

Article de Florence Colombani
paru dans l'édition Le Monde

D'un côté, un colleur d'affiches, à la recherche de sa bicyclette volée dans l'Italie sinistrée de l'après-guerre. De l'autre, un séducteur en costume clair, sourire charmeur au coin des lèvres. Difficile d'imaginer deux hommes plus différents qu'Antonio Ricci, le héros du Voleur de bicyclette, et son créateur, Vittorio De Sica.


Né dans un milieu modeste à l'orée du siècle, Vittorio De Sica grandit à Naples. Célèbre dès les années 1920, il est une sorte de Jean-Pierre Aumont transalpin, à l'aise dans un registre léger, capable de profondeur à l'occasion, lorsque Max Ophuls (Madame de...) ou Roberto Rossellini (Le Général Della Rovere ) sont derrière la caméra.





Comme cinéaste, De Sica est un artiste rare, dont la sensibilité humaniste va de pair avec une lucidité cruelle. « L'expérience de la guerre fut déterminante pour nous tous. Chacun ressentit le désir fou de balancer toutes les vieilles histoires du cinéma italien, de planter la caméra au milieu de la vie réelle, au milieu de tout ce qui frappait nos yeux atterrés », écrit-il en 1960, jetant un regard rétrospectif sur sa participation au mouvement néo-réaliste (cité par Jean A. Gili dans Cinéma italien, éd. de La Martinière).


Au milieu de la seconde guerre mondiale, De Sica passe à la réalisation. Quelques comédies insouciantes, puis c'est la rencontre avec son scénariste fétiche, Cesare Zavattini. Dans leur première collaboration, Les enfants nous regardent, ils font d'un petit garçon dont les parents se déchirent l'incarnation poignante d'une Italie maltraitée par le pouvoir. Délicatesse du regard, peinture d'une solitude existentielle et d'un désarroi social : les qualités de l'oeuvre à venir sont déjà là.


A la même époque, le monteur Mario Serandrei emploie pour la première fois le mot « néo-réaliste » pour qualifier Ossessione, de Luchino Visconti. Roberto Rossellini s'apprête à révéler crûment la violence de Rome ville ouverte. De Sica s'inscrit dans cette quête de vérité. Il conçoit un cinéma dépouillé de ses artifices les plus voyants (décors, comédiens professionnels), un cinéma de la rue. Ce qui ne signifie nullement un abandon de la fiction.


Le cinéaste raconte toujours des histoires, et même des fables. Il rencontre ainsi le succès international : le Grand Prix et le Prix international de la critique à Cannes, en 1951, pour son utopique Miracle à Milan, et quelques Oscars, notamment pour le douloureux Sciuscia, pour Le Voleur de bicyclette ou encore Le Jardin des Finzi-Contini. Si le pouvoir lui reproche volontiers de donner une image trop noire de l'Italie, il jouit de l'affection indéfectible du public.


Poursuivi par la censure, il doit renoncer à un projet sur la prostitution enfantine à Naples, et se tourne vers des sujets moins controversés, magnifiant la beauté de Sophia Loren ( La Ciociara ) et de Jennifer Jones ( Stazione Termini ). L'un de ses derniers films, Le Jardin des Finzi-Contini, d'après le roman de Bassani, tourné quatre ans avant sa mort à Paris en 1974, a une élégance mélancolique qui lui ressemble.


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Le Voleur de bicyclette (Ladri di biciclette) de Vittorio de Sica


Titre Original : Ladri di biciclette

Titre Français : Le Voleur de Bicyclette

Année : 1948

Pays : Italie

Type : Drame - Durée : 1h33

Réalisation : Vittorio de Sica

Avec Lamberto Maggiorani (Antonio Ricci), Enzo Staiola (Bruno), Lianella Carell (Maria), Gino Saltamerenda (Baiocco), Vittorio Antonucci (le voleur)...


Article d’Amédée Ayfre des Cahiers du cinéma
paru dans l'édition Le Monde 09.01.05

A propos du « Voleur de bicyclette », les « Cahiers du cinéma » écrivaient, en 1952, que Vittorio De Sica et son coscénariste Cesare Zavattini avaient mis de longs mois à écrire un récit pour finir par faire croire qu'il n'existait pas.


Cet homme à la recherche de son vélo n'est pas seulement un ouvrier, un homme qui aime son fils, qui désespéré tente de voler une autre machine et qui finalement représente la détresse du prolétariat réduit à se voler ses instruments de travail.


Il est tout cela et une foule d'autres choses encore, indéfiniment analysables, justement parce que, d'abord, il est, et pas isolément, mais avec tout un bloc de réalité autour de lui, et dans ce bloc des traces de la présence de l'univers : les copains, l'église, les séminaristes allemands, Rita Hayworth sur son affiche, et tout cela ne constitue pas seulement un décor, mais "existe" presque sur le même plan.


Ne faut-il pas infiniment d'art pour organiser un récit, monter une mise en scène, diriger des acteurs, en donnant finalement l'impression qu'il n'y a ni récit, ni mise en scène, ni acteurs ? Autrement dit, nous avons affaire ici encore à un réalisme second, synthèse du documentarisme et du vérisme.


Avec celui-ci on reconnaît que l'idéal du premier ne peut être atteint sans un détour, mais avec celui-là on ne croit pas que ce détour doive consister en une stylisation de l'événement. L'illusion esthétique parfaite de la réalité ne peut résulter que d'une ascèse prodigieuse des moyens, où il y a en fin de compte plus d'art que dans tous les expressionnismes ou les constructivismes.


Ascèse d'abord du scénario. Il ne s'agit plus seulement d'un scénario bien construit, selon une impeccable logique dramatique, avec des contrepoints psychologiques subtils. Ce n'est pas d'architecture qu'il s'agit, c'est d'existence. Si en quelque domaine l'artiste mérite le nom divin de créateur, c'est bien ici. Aussi pour cela n'est-il presque jamais seul.


Les équipes de scénaristes italiens sont célèbres. On a voulu n'y voir que souci publicitaire, mais il y a plus profond, ce sentiment de l'infinie richesse de l'être qu'un homme seul ne pourrait jamais parvenir à évoquer. Zavattini et De Sica ont travaillé pendant des mois le scénario du Voleur de bicyclette pour finir par faire croire qu'il n'y en avait pas.


Cette ascèse du scénario se complète par une ascèse de la mise en scène et une ascèse des acteurs qui nécessitent toujours des suppléments d'artifices pour faire par exemple que, dans les tournages en extérieur, l'introduction d'une caméra et sa manipulation n'entraînent aucune perturbation apparente, ou pour que l'ouvrier et son fils ne tiennent pas plus un rôle que leur vélo.


Dans le réalisme phénoménologique, l'art se pose donc dans l'acte même par lequel il cherche à se détruire. Mais de cela, il est parfaitement conscient, et il en fait la charte même de sa légitimité esthétique. En même temps que sa définition, si l'on ajoute que chez lui tout est tourné à produire une densité d'être, qui est, selon un mot plus vieux que Sartre, la seule vraie mesure de la beauté.





Extrait : Ladri di Biciclette | Le Voleur de bicyclette (1948) Vittorio de Sica






Brutti Sporchi e Cattivi | Affreux, Sales et Méchants | 1976 | Ettore Scola



Titre Français : Affreux, Sales et Méchants

Titre original : Brutti Sporchi E Cattivi

Année : 1976


Pays :
Italie - Comédie dramatique - 1h55

Réalisation : Ettore Scola

Scénario : Ettore Scola, Sergio Citti, Ruggero Maccari.

Photographie : Dario Di Palma.

Musique : Armando Trovajoli.

Production : Romano Dandi, Carlo Ponti.

Interprètes : Nino Manfredi (Giacinto Mazzatella), Francesco Anniballi (Domizio), Maria Bosco (Gaetana), Giselda Castrini (Lisetta), Alfredo d'Ippolito (Plinio), Giancarlo Fanelli (Paride), Marina Fasoli (Maria Libera), Ettore Garofolo (Camillo), Marco Marsili (Marce), Franco Merli (Fernando), Linda Moretti (Matilde), Luciano Pagliuca (Romolo), Giuseppe Paravati (Tato), Giovanni Rovini (Antonecchia)...


LES DERACINES D'ETTORE SCOLA

Affreux, Sales et Méchants (Brutti Sporchi e Cattivi) est « un spectacle délirant où le gag débridé aboutit à la plus lucide observation sociale », Archive Le Monde , en 1976, Jacques Siclier.


Ettore Scola, qui fut souvent scénariste de Dino Risi, a tourné une douzaine de films depuis 1964. Nous ne connaissions que Drame de la jalousie (1970) lorsque, cette année, Nous nous sommes tant aimés a révélé ce réalisateur de 45 ans quasi inconnu et lui a donné, son image de marque.

Peinture de la nostalgie, des illusions et désillusions d'une « génération perdue », Ettore Scola renouvelait la comédie italienne par le réalisme historique, la chronique psychologique et l'éloge de la cinéphilie (références à De Sica, Fellini, Antonioni). On lui fit un succès largement mérité, mais dont pâtit un peu aujourd'hui Affreux, sales et méchants (Brutti Sporchi e Cattivi), présenté au Festival de Cannes et diversement accueilli malgré son grand prix de la mise en scène.


Il est toujours tentant de définir un cinéaste par un seul film réussi, accompli en son genre, et que tout le monde a apprécié. Avec Ettore Scola, il ne s'agit pas de consécration hâtive, mais d'un malentendu engendré, chez nous, par Nous nous sommes tant aimés, dont la tendresse envers les personnages et la délicatesse de touche ne se retrouvent pas dans Affreux, sales et méchants, comédie d'humour noir située dans un bidonville romain. Que Scola, homme de gauche, donne à voir des pauvres, victimes du système capitaliste, qui ne sont ni beaux, ni propres, ni bons, ni vertueux, ni conscients de la lutte des classes, voilà bien de quoi déconcerter les intellectuels cannois et parisiens qui n'envisagent le cinéma politique qu'en fonction d'une idéalisation du prolétariat ! Il faut dissiper ce malentendu.


LES « MAUVAIS PAUVRES »
D'abord, nuançons. Nous sommes en Italie, du côté de Rome, et les pauvres d’Ettore Scola, migrants du Sud italien, des Pouilles et de Sicile, vivant d'activités plus ou moins licites ou pratiquant de bas métiers peu rémunérés, appartiennent, en fait, à un sous-prolétariat replié sur lui-même. Giacinto (Nino Manfredi), patriarche d'une indescriptible famille nombreuse, vivant dans une indescriptible cabane, refuse de partager avec les siens un magot de 1 million de lires, des indemnités reçues pour la perte d'un oeil brûlé par de la chaux vive. Autour de lui, les habitants du bidonville reproduisent, jusqu'à la caricature, l'organisation de la société bourgeoise : hiérarchie familiale et sociale, commerce, activités lucratives (y compris la prostitution), lutte pour le pouvoir et l'argent, moeurs sexuelles...


Cet ordre de la misère est, en creux, celui de l'abondance. On n'a pas l'eau courante, mais on a la télévision, on vend, on troque, on se bat pour un « héritage » jusqu'à chercher à empoisonner le patriarche qui refuse de le céder de son vivant. On exploite même la vieillesse improductive (la retraite de la grand-mère).


Les « mauvais pauvres » de Ettore Scola, on les trouvait déjà dans Les Misérables, de Victor Hugo, avec les Thénardier et leur clique, et dans les bas-fonds londoniens bien organisés de l'Opéra de quat'sous, de Brecht. Mais comme Scola n'emploie ni le lyrisme hugolien, ni la distanciation brechtienne, ni même le paupérisme esthétique de Pasolini (Accatone) ou la pitié désespérée de Comencini (le bidonville de Lo Scopone scientifico), il déconcerte et certains lui reprochent d'avoir fait injure aux miséreux des grandes villes en faisant rire à leurs dépens.


C'est oublier - ou vouloir ignorer - que la « comédie italienne » est le néoréalisme italien moderne et qu'elle englobe, à travers l'humour même poussé au plus noir, tous les problèmes, tous les maux contemporains, dans une attitude politique. Le sous-prolétariat des bidonvilles est une immonde verrue qui pousse inévitablement sur le corps social des sociétés industrielles capitalistes. On ne recrute pas, ou guère, dans cette « classe dangereuse », dont tout le monde cherche à ignorer l'existence, y compris les prolétaires qui ont accès, par leur travail, leur établissement, aux biens de consommation.


L'audace et la force du film de Ettore Scola, de cette énorme farce chargée d'énormes effets, de scènes cruelles et gênantes dans leur développement comique, c'est de faire éclater cette verrue, dans un spectacle délirant où le gag débridé aboutit à la plus lucide observation sociale (le réveil du bidonville, pour ne citer que cela).


La mise en scène fourmille d'idées, et Nino Manfredi, monstre sacré génial, défend son « pognon » contre toutes les ruses et tous les forfaits, comme un notable bourgeois son coffre-fort. Roi de l'enfer suburbain, il joue, avec les siens, Shakespeare au bidonville et, comme il n'a pas de belles manières, il se fait un lavage d'estomac à l'eau polluée, avec une pompe à vélo, pour régurgiter un plat de spaghetti empoisonnés. Le style de Ettore Scola, c'est l'outrance et le sarcasme, sur un sujet qui ne prête pas à l'élégie et qu'il faut savoir regarder en face.


Ettore Scola le sarcastique n'ignore d'ailleurs pas la tendresse lorsqu'il montre des enfants qu'on enferme, pour la journée, dans un enclos grillagé, école et terrain de jeux, lorsqu'il montre l'innocence souillée d'une adolescente qui se retrouve enceinte à la fin du film. Il peint aussi la misère culturelle de ces déracinés dans la scène de la chorale des pauvres s'essayant à chanter, en dialecte, et pour un verre de vin, le choeur de la liberté de Nabucco, de Verdi.



Bande Annonce VO | Brutti Sporchi e Cattivi (1976) Ettore Scola




M le Maudit | Fritz Lang | 1931

Titre Français : M le Maudit

Titre Original : M Eine Stadt Sucht Einen Mörder

1931 - Allemagne

Policier / Film-noir / Thriller - 1h45

Réalisation : Fritz Lang

Avec : Peter Lorre (Hans Beckert), Gustaf Gründgens (Schraenker), Ellen Widmann (Madaem Beckmann), Inge Landgut (Elsie Beckmann), Otto Wernicke (Inspecteur Karl Lohmann)...

Scénario : Fritz Lang et Thea von Harbou, d'après un article d'Egon Jakobson

Photographie : Fritz Arno Wagner

Décors : Edgar G. Ulmer

Production : Nero Films


Fritz Lang parle de "M le Maudit"

Dans un entretien aux « Cahiers du cinéma » publié en 1966, le réalisateur explique qu'il a fait appel à « douze ou quatorze hors-la-loi » pour tourner la scène du jugement

Après les grandes fresques des Nibelungen, Metropolis et La Femme sur la lune, je me suis intéressé davantage aux êtres humains, aux mobiles de leurs actes. Contrairement à ce que beaucoup de gens croient, M le Maudit n'était pas tiré de la vie de l'infâme assassin de Düsseldorf, Peter Kürt. Il se trouve qu'il avait juste commencé sa série de meurtres pendant que Thea von Harbou et moi étions en train d'écrire le scénario. Le script était terminé bien avant qu'il ne soit pris.

En fait, la première idée du sujet du film M m'est venue en lisant un article dans les journaux. Je lis toujours un peu les journaux en quête d'un point de départ pour une histoire. A cette époque, je travaillais avec la Scotland Yard de BerlinAlexanderplatz), et j'avais accès à certains dossiers dont la teneur était assez confidentielle. C'étaient des rapports sur d'innombrables assassins comme Grossman de Berlin, le terrible Ogre de Hanovre (qui a tué tant de jeunes gens) et d'autres criminels de même acabit.

Pour le jugement, dans M, je reçus l'aide inattendue d'une organisation de malfaiteurs parmi lesquels je m'étais fait des amis au début de mes recherches pour le film. En fait, j'ai vraiment utilisé douze ou quatorze de ces hors-la-loi, qui n'étaient pas effrayés à l'idée d'apparaître devant ma caméra car ils avaient déjà été photographiés par la police.


MON PREMIER FILM PARLANT
D'autres auraient bien aimé m'aider, mais ils n'ont pas pu le faire, parce qu'ils n'étaient pas connus des brigades criminelles. J'étais en train de finir le tournage des scènes où se trouvaient donc de véritables malfaiteurs, quand j'ai été informé que la police arrivait. Je l'ai dit à mes amis, mais en les priant de rester pour les deux dernières scènes. Ils acceptèrent tous et j'ai tourné très rapidement. Quand la police arriva, mes scènes étaient dans la boîte et mes « acteurs » avaient tous disparu

Si j'avais été associé à un producteur, je n'aurais jamais pu faire ce film. Quel producteur aurait voulu d'un film sans histoire d'amour et où le héros est un assassin d'enfants ? Comme M était mon premier film parlant, j'ai fait des expériences avec le son, qui n'étaient évidemment pas possibles dans le cinéma muet.

Souvenez-vous du mendiant aveugle qui va au Bazar des mendiants pour louer un orgue à main : quand on lui joue un morceau, quelques fausses notes heurtent son ouïe ; brusquement, il met ses mains sur ses oreilles pour ne plus entendre ces sons discordants et, au même moment, la musique s'arrête dans le film. Il y a d'autres moments où je me suis servi du son : les pas dans le silence étrange d'une rue, la nuit, ou bien la respiration lourde du tueur d'enfants.

Mais, de même que le son peut donner de l'intensité à une scène, la suppression délibérée d'une action peut en augmenter le contenu dramatique. Laissez-moi vous expliquer... Quand l'enfant est tuée, sa petite balle sort en roulant d'un buisson et finalement s'arrête. Le public l'a identifiée avec la petite fille et à partir de cela, par association d'idées, il sait qu'avec le mouvement de la balle, la vie de la petite fille s'est arrêtée aussi.

Je ne pouvais pas, bien sûr, montrer d'horribles violences sexuelles sur cette enfant, mais en ne montrant pas l'action, j'obtenais plus de réactions chez le public que si j'avais réellement montré la scène en détail. J'obligeais le spectateur à se servir de sa propre imagination.


UNE SORTE DE PSYCHANALYSTE
D'autre part, un simple procédé peut augmenter l'intensité d'une scène en montrant ce que l'acteur est supposé penser. Vous souvenez-vous du « gadget » mobile dans la vitrine d'une boutique de jouets ? Une flèche se déplaçant de haut en bas vers l'oeil d'un taureau ?... Cela prend pour le meurtrier une signification sexuelle dont le public est pleinement conscient... [...]

J'ai souvent dit qu'un metteur en scène, travaillant avec des acteurs, devait être une sorte de psychanalyste, non pas pour les acteurs eux-mêmes, bien sûr, mais pour les personnages. Ils existent d'abord sur le papier ; le metteur en scène doit les faire vivre pour l'acteur, puis pour le public.

Un jour, à Hollywood, un écrivain m'a dit : « Je sais exactement ce que vous pensiez quand vous tourniez telle scène de M », et je lui ai répondu : « Dites-le. » Il m'a longuement débité sa théorie et c'était complètement faux. Du moins, je le pensais à l'époque, mais des années plus tard, alors que j'étais en pleine conférence de presse à Paris et que je racontais cette anecdote, je me suis arrêté net, parce que j'ai réalisé qu'il pouvait y avoir une profonde vérité dans ce genre de choses... que ce que l'on appelle la « touche » d'un metteur en scène venait de son subconscient - et lui-même en est inconscient quand il fait son film...

Gretchen Weinberg
Une confession de Fritz Lang "Cahiers du cinéma" publié en Juin 1966


L'Auteur en Majesté

Comme Griffith , Murnau et quelques autres, Fritz Lang fait partie de la petite communauté de cinéastes qui, d'emblée, malgré une méfiance originelle envers un art jugé impur, ont été considérés comme des artistes majeurs. A tel point que le créateur de Metropolis, en 1927, en est venu à incarner l'Auteur dans toute sa majesté (et à jouer ce rôle dans Le Mépris réalisé par Jean-Luc Godard en 1963).

Pendant sa carrière européenne, de 1919 avec Le Maître de l'amour à 1934 avec Liliom, Lang exerce un contrôle absolu sur la fabrication de ses films. A Hollywood (de Furie en 1936 au Diabolique Docteur Mabuse en 1960), il luttera pour conserver sa liberté.

Il avait tout du mythe : l'oeuvre géniale, où se succèdent les chefs-d'oeuvre, et une incroyable personnalité.

Prenons par exemple l'histoire de sa convocation par Goebbels. Il venait de réaliser un film ouvertement antinazi, Le Testament du Docteur Mabuse en 1932. Mais voici que le ministre de la propagande lui déclare : « Le Führer a vu votre film Metropolis et a dit : voici l'homme qui créera le cinéma national-socialiste. » « Le soir même, j'étais dans le train », racontait Lang. L'anecdote manque de sérieux historique ? Qu'importe, elle est plus langienne que nature avec son mélange d'angoisse et de panache.

Fritz Lang était né à Vienne, en 1890, dans la bonne bourgeoisie catholique (sa mère, juive, s'était convertie). Tenté par la peinture, il se découvre, à Berlin, une vocation de cinéaste. Décision qui naquit, écrivit-il, « d'une conviction étrange, presque somnambulique ».

Sa première femme se suicide après l'avoir découvert dans les bras de sa scénariste, Théa von Harbou. Lang est soupçonné de meurtre, expérience qui le laisse paranoïaque : son amie et biographe Lotte Eisner raconte que, jusqu'à trente ans plus tard, établi à Beverly Hills, il notait tous ses faits et gestes dans un « épais volume » pour avoir toujours un alibi irréfutable à disposition.

Dans les films allemands, son style est déjà d'une audace étonnante. Surimpressions admirables dans Docteur Mabuse en 1922 ; géométrie précise dans Les Nibelungen en 1924 et le futuriste Metropolis en 1926.

Les ombres qui planent sur M le Maudit annoncent l'avenir immédiat de l'Allemagne. Plus largement, elles témoignent d'une conception de l'homme fondée sur la pulsion de mort. « Le désir de blesser, le désir de tuer, écrivait-il, sont étroitement liés au besoin sexuel, sous l'empire duquel aucun homme n'agit raisonnablement. »

La mort, « le plus grand drame », qui « a toujours le dernier mot », hante toute son oeuvre, des sublimes films noirs (La Femme au portrait en 1944 ; Le Secret derrière la porte en 1948) au chef-d'oeuvre sur l'enfance déguisé en film d'aventures (Les Contrebandiers de Moonfleet en 1955).

Il s'éteint en 1976, seize ans après un dernier Mabuse, laissant une oeuvre immense. « Lang, qui vivait avec tant d'intensité, ne se laisse pas réduire - lui et ses films - à un dénominateur commun », écrivait Lotte Eisner.

Florence Colombani
Article Le Monde dans l'édition du 03.10.2004



M ou l'Esprit de la Lettre

C'est à la lettre, évidemment, qu'il faut prendre le plan le plus connu de M le Maudit. Etonnante cinégénie de ce caractère central de l'alphabet qui s'inscrit au milieu de l'écran au moment où le tueur de fillettes découvre dans un miroir la marque infamante qui le désigne à la vindicte publique. Il n'est guère moyen, en effet, de différencier le M majuscule de son reflet.

La lettre et son double viennent illustrer un principe de réversibilité dont l'affirmation, répétée tout au long du film, continue à fasciner et à déranger le spectateur du XXIe siècle. Aplanissement de tous les pôles, perte des points de repère : le premier opus parlant de Fritz Lang fait partie de ces rares chefs-d'oeuvre dont la consécration ne réussira jamais à éroder le pouvoir subversif.

Lorsque tant d'autres films jouent de la transformation, M proclame, comme son héros psychopathe, que je est aussi un autre. Manière d'affirmer, en radicalisant le modèle romanesque de Stevenson (que Lang ne fera qu'adapter tout au long de sa carrière), que Dr Jekyll est Mr Hyde. Il faut donc revenir au personnage de Hans Beckert, créature hallucinée interprétée par un Peter Lorre extatique, et l'entendre déclarer à ses juges en une séance fulgurante d'auto-analyse : « Je sens que quelqu'un me suit par les rues. C'est l'autre qui me poursuit. Et parfois j'ai l'impression de me poursuivre moi-même. »

Dès lors, la culpabilité du tueur d'enfants n'a plus d'égale que son insupportable irresponsabilité. Sa question toute rhétorique « Est-ce que je peux faire autrement ? » renvoie à l'idée d'une malédiction à l'antique que la traduction française du titre, pourtant excessivement bavarde, perçoit avec justesse. La force de Lang est précisément de ne pas escamoter le scandale et le trouble que suscite ce point de vue. Le cinéaste donne donc la parole aux tenants de la plus radicale des politiques répressives et les laisse ironiser sur l'innocence d'un criminel qu'ils ont condamné bien avant la mascarade du procès.


TRIBUNAL DE GUEUX ET DE CRIMINELS
« Elle est bonne ! Pour qu'on te déclare irresponsable et qu'on te cajole dans une maison de santé ! Puis tu t'échapperas ou il y aura une amnistie. Et toi, peinard, t'as rien à craindre : t'es irresponsable. Tu zigouilleras encore des fillettes ! » Discours universellement connu que celui des tenants de la peine de mort, avec lequel le cinéaste prend ses distances. C'est un tribunal de gueux et de criminels - présidé par un chef de gang dont la blondeur, le manteau de cuir et la froide brutalité dessinent avant l'heure le nazi archétypal - dont les résolutions eugénistes invitent à l'exécution : « Il faut l'exterminer. Il faut l'éliminer. » Termes terrifiants au regard de l'Histoire.

Gardons-nous pourtant de conclure à la supériorité de la justice régulière sur celle de la pègre. Le procès souterrain n'est sans doute que la métaphore du procès régulier. L'issue de ce dernier, dont Lang feint de se désintéresser, ne sera probablement pas différente pour l'accusé. Les citoyens ordinaires n'ont-ils pas fait montre dès les premières minutes du film d'un goût pour le lynchage que ne renie pas la faune de l'Unterwelt ?



Comment, d'ailleurs, ne pas interpréter dans le même sens la quête parallèle des hors-la-loi et des policiers ? Et le comble que représente la victoire de bandits bien organisés prenant de vitesse les autorités dans leur traque du criminel ? Le commissaire ment à celui qu'il veut faire avouer. Le cambrioleur pris sur le fait se compare à un « nouveau-né ». L'assassin est formellement reconnu par un aveugle. C'est bien un monde où se répondent vrais coupables et faux innocents qui se dessine.

La puissance démonstrative du raccord sonore enfonce le clou : une phrase commencée par un policier peut être terminée par un truand. Le genre même du film est contaminé par cette confusion généralisée. La multiplication des documents écrits - journaux, affiches, lettres - ainsi que la description minutieuse des indices et des méthodes d'investigation des enquêteurs abolissent la frontière du documentaire et de la fiction. Ne subsiste alors que le doute hyperbolique et violemment pessimiste d'un cinéaste qui n'hésite pas à s'impliquer dans le scepticisme ambiant. Nul n'a oublié l'obsédante Chanson de Solveig, tirée de Peer Gynt, de Grieg, qui sert de leitmotiv aux apparitions du criminel. Devant l'incapacité de Peter Lorre à siffloter la fameuse scie, Fritz Lang choisit, dit-on, d'interpréter lui-même l'entêtante mélodie du tueur. Et de devenir, à jamais, la doublure de M.

Thierry Méranger - Le Monde



Extrait : M le Maudit (1931) Fritz Lang






Festen | Thomas Vinterberg | 1998

FESTEN (Fête de famille, Danemark, 1998, 106 min).

RÉALISATION : Thomas Vinterberg, Morgens Rukov, d'après une idée de Thomas Vinterberg.

PHOTOGRAPHIE : Anthony Dod Mantle D.

SON : Morten Holm.

MONTAGE : Valdis Oskardottir.

PRODUCTION : Nimbus Films APS.

INTERPRÈTES : Ulrich Thomsen (Christian Klingenfeldt), Henning Moritzen (Helge Klingenfeldt, le père), Thomas Bo Larsen (Michael), Paprika Steen (Helene), Birthe Neumann (la mère)


Délivrez-nous du père

DOGMA 95 est le nom du nouveau décalogue à quoi souscrit Thomas Vinterberg : " Tu ne poseras pas ta caméra ; tu n'utiliseras pas de musique off ; tu ne feras pas d'images propres... " Comme toujours avec les dogmes, l'important n'est pas d'y croire (aucun catholique romain ne croit sérieusement à l'infaillibilité pontificale), mais de s'obliger à y croire, et de se livrer pieds et poings liés à des vérités d'apparence. En cela, les signataires de la charte ont quand même une idée forte : le cinéma se doit d'obéir - avec toutes les transgressions d'usage - à des principes improbables qui lui sont extérieurs. Ce ne sont pas les films qui imposent leur forme, mais la forme qui est imposée aux films.

Festen, de Vinterberg ressemble beaucoup aux Idiots, de Lars von Trier, autre film-Dogme, sauf que Vinterberg est plus virtuose et qu'il s'autorise plus de dérangeantes audaces. Résultat : Festen est un film beaucoup plus réussi que Les Idiots. Réussi, au demeurant, n'est peut-être pas le mot puisque tout le film de Vinterberg joue le jeu d'une (fausse) incurie esthétique : découpé et monté en dépit du bon sens, cadré n'importe comment, pas éclairé du tout, mais joué admirablement, ce qui prouve s'il en était besoin que cette incurie n'a pas pour visée la laideur, mais une nouvelle beauté. Une beauté démocratique puisqu'elle renonce à tout ce qui est de l'ordre de la maîtrise technique et prône le bâclé et l'amateurisme formels. Dogmatique en diable, Vinterberg fait semblant de croire à l'art démocratique, il n'ignore pas qu'il faut encore savoir ne pas savoir faire. Pour le reste, Festen ressemble à un film nordique comme il a dû déjà s'en tourner beaucoup et dont le modèle idéal serait Fanny et Alexandre, d'Ingmar Bergman.

Une famille au-dessus de tout soupçon, grande bourgeoise et protestante, se réunit pour fêter le patriarche. Mais tout tourne mal parce qu'un des fils décide de déballer le secret de famille : le père violait ses enfants. Il faudra tout le film pour que les convives se décident à croire le fils violé. Où l'on voit que la question du Dogme a des applications concrètes. La vérité n'est jamais qu'une affaire de croyance, et les convives ne sont pas prêts à remettre en cause si facilement le patriarche qui fut la foi de leur vie. Il faudra au fils, symboliquement nommé Christian, une bonne dose de ténacité et une stratégie compliquée pour produire une nouvelle vérité, aidé en cela par un bienveillant personnel, cuisiniers et femmes de chambre réunis - la domesticité (c'est une affaire de classe) ayant toujours un autre credo que les maîtres.

Ce recours aux cuisines de la maison bourgeoise comme lieu de commentaire de l'action et moteur caché de la machine évoque bien sûr les mongoliens des cuisines de L'Hôpital et ses fantômes de Lars von Trier. Comme aussi il y a dans Festen un fantôme pour venir en aide à Christian (très beau moment). Allusion, hommage d'un Danois à l'autre, vol qualifié ? Plutôt recours à une culture commune où les arrière-mondes sont à portée de main et où le fantastique fait partie des meubles.

Stéphane Bouquet,

"Les Cahiers du cinéma", juin 1998


Du Dogme à Hollywood

S'ÉTONNERA-T-ON d'apprendre que Thomas Vinterberg, né à Copenhague en 1969, a grandi dans une communauté hippie sans aucun point commun avec le cénacle bourgeois perclus de tabous qu'il démolit dans Festen ? Juste retour de bâton, le jeune Thomas devint premier de la classe et plus jeune diplômé de l'Ecole nationale du cinéma, celle où Lars von Trier avait lui-même étudié une dizaine d'années auparavant.

Si la famille comme cellule, ensemble de valeurs, n'a pas structuré son imaginaire, c'est pourtant une utopie familiale qui affleure dans son premier long métrage. Dans Les Héros, Thomas Bo Larsen et Ulrich Thomsen, deux marginaux loufoques, apprennent que l'un d'eux est père d'une fillette de 12 ans. Dès lors, ils n'ont de cesse de la sauver des griffes d'un beau-père violent pour l'embarquer dans leur "road trip" vers la Suède. Le conte doux-amer ne convainc guère, mais la fratrie de Festen est trouvée.

Concocté sur un coin de table avec trois amis cinéastes, le Dogme apporte au tout jeune Vinterberg une contrainte productive. Le 20 mars 1995, à Paris, au Théâtre de l'Odéon, Lars von Trier et Thomas Vinterberg lancent un paquet de tracts rouges dans l'assemblée qui célèbre le centenaire du cinéma. "Le cinéma antibourgeois est lui-même devenu bourgeois", lit-on dans ce manifeste anti-auteur qui recommande de ne plus signer les films.

Les autres commandements de ce "voeu de chasteté" : décors et lumières naturels, son direct, caméra portée, unité de lieu et de temps, musique additionnelle, trucages et armes à feu interdits... De plus, les réalisateurs du Dogme s'engagent à s'abstenir de tout goût personnel et à ne plus se revendiquer artiste ! Au risque d'un rapprochement inattendu, il faut rappeler qu'un Jean Renoir eut à ses débuts un semblable mouvement de réaction envers le cinéma des années 1920 se déclarant pompeusement "artistique" : "Mes camarades et moi, nous haïssions ce mot artistique", rappelle-t-il dans un entretien avec Jacques Rivette en 1966.

Caprice d'enfant gâté ? Restes d'éducation protestante ? Discours de la méthode ? Quoi qu'il en soit, en termes de publicité, le Dogme fonctionne, les demandes de labellisation des films abondent, encore aujourd'hui, en provenance du monde entier. Festen, avec ses airs de film de famille tournant au vinaigre, se pose en exemple séduisant de la " purification " des effets de style.

Pourtant, emporté par un succès inattendu, Thomas Vinterberg, invité au Festival de Cannes en 1998, dévia du Dogme en cédant aux sirènes " bourgeoises " du vedettariat. Il en oublia même de ne pas signer Festen... Le Dogme aura été pour lui un sésame temporaire. Festen, de loin son film le plus réussi, lui ouvre les portes de Hollywood pour davantage de compromis et un sentimentalisme aussi mièvre que dans Les Héros, avec It's All About Love (2002). Même lorsqu'il adaptera, en 2003, un scénario de Lars von Trier, Dear Wendy, une parabole sur l'usage des armes à feu par les adolescents américains qui n'a pas, loin s'en faut, le brio de l'Elephant de Gus van Sant. Renverser le mauvais père n'aura pas suffi à l'enfant terrible du Dogme devenu son enfant gâté.

Charlotte Garson

"Les Cahiers du Cinéma"




Extrait : Festen (1998) Thomas Vinterberg

Brazil | Terry Gilliam | 1985



Titre Original : Brazil
Pays : GRANDE-BRETAGNE
Année : 1985

Réalisation : Terry Gilliam

Interprètes : Jonathan Pryce (Samuel Lowry dit "Sam"), Robert De Niro (Archibald Tuttle dit "Harry"), Katharine Helmond (Mrs Ida Lowry), lan Holm (Mr Kurtzmann), Bob Hoskins (Spoor), Michael Palin (Jack Lint), lan Richardson (Mr Warrenn), Peter Vaughan (Mr Helpmann)...

Infos sur le Film :
Une mouche et une erreur administrative... (Central Services) : Archibald Tuttle / Archibald Buttle

Une Affiche qui en dit long :
Help the ministry of information help you (Aidez le ministere de l'information A vous aider).
Une Statue : The shall make you free (La vérité vous libèrera).

Une Affiche :
"Happiness > We're all in it together".
Deux répliques entre Jonathan Pryce (Samuel Lowry dit "Sam") et Robert De Niro (Archibald Tuttle dit "Harry") :"We're all in this together" et "We're all in it together" (Nous y sommes tous jusqu'au cou).


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Brazil : la chanson

Véritable leitmotiv du film de Terry Gilliam, la chanson Brazil a été chantée A la fin des années 30 par le très populaire chanteur latino Arry Barroso.

Info : Brazil music by Ary Barroso / English lyrics by S. K. Russell / (1939 by Irmaos Vitale, Rio de Janiero, Brazil)

  EXTRAIT : "Brazil, Where hearts were entertained in june. We stood beneath that amber moon. And clung together, then tomorrow was another day. The morning found me miles away. With still a million things to say. And now, when twilight beams the sky above..."

TRADUCTION : "Brésil, la ou les coeurs se divertissaient en juin. Nous nous tenions sous cette lune d'ambre. Et nous nous accrochions, alors demain était un autre jour. Le matin me trouvait a mille lieues de là. Avec encore des millions de choses à dire. Lorsque le crépuscule rayonne dans le ciel au-dessus..."



Informations Allociné :
Un monde A la Kafka
Avec son administration envahissante jusqu'A l'absurde, Brazil fait irrésistiblement penser à l'oeuvre de l'auteur tchéque Franz Kafka et notamment à La Métamorphose. La ville tentaculaire, sa population grouillante et épiée rappelle, elle, 1984, le roman visionnaire de George Orwell.

L'inspiration de Gilliam
De son propre aveu, Terry Gilliam s'est inspiré de la ville côtière de Port Talbot pour créer le monde de Brazil, une cité dont les usines grises l'ont amené A un imaginer un hommage dont le seul échappatoire serait la chanson Brazil.

Un caméo de Terry Gilliam
Terry Gilliam apparaît furtivement dans son film, en fumeur de cigarettes qui croise le chemin de Sam Lowry dans la tour Shang-ri La.

Un hommage au "Cuirassé Potemkine"
La séquence de fin de Brazil contient un hommage appuyé au Cuirasse Potemkine et à sa fameuse scène du landau dévalant les escaliers. Cette fois, un landau descend les marches après que la mère de l'enfant a été tuée lors de l'assaut consécutif A la libération de Sam Lowry.

Deux extraits de la musique du film "Brazil | 1985 | Terry Gilliam" à écouter :
Voir la playlist musique de film du site 7 Art Cinema | Film Musics | Brazil - 1985 - Terry Gilliam | N2 & N16





Bande Annonce VO : Brazil (1985) Terry Gilliam